Adieu à Chantal GARRAUD
10 octobre 2010Nous nous sommes retrouvés très nombreux vendredi dernier pour accompagner cette figure de notre paroisse et de l'Enseignement Catholique... en ligne, le mot d'accueil et l'homélie prononcés par le P. François RENARD.
Mot d’accueil de la célébration pour Chantal
C’est Chantal, en fait, ce matin qui nous accueille. Elle avait préparé cette célébration depuis longtemps, choisi les chants, les textes, les animateurs, non pas pour se mettre en avant, parce que ce n’était pas sa manière d’être, mais pour que tous nous nous sentions bien autour d’elle. Elle était persuadée, convaincue, qu’elle serait avec nous depuis la fenêtre du ciel. Alors Chantal, Chantou, (pour ceux qui te connaissent mieux), nous voici à ton invitation autour de toi, avec ceux qui te sont les plus chers : Patrice, Etienne, Hélène et Sophie, tes parents, tes frères et sœurs, et tous tes proches. Mais aussi tes nombreux amis sont là, ceux du diocèse de Limoges et particulièrement ceux de l’Enseignement Catholique à qui tu te seras donnée sans compter par amour des jeunes. Nous voici tous une nouvelle fois avec toi, pour célébrer ce que tu vivais avec force : l’eucharistie, cette communion où le Christ se donne et où nous nous donnons les uns aux autres. Les longs discours t’ennuyaient. Mais les regards intenses, les sourires, les paroles d’amitié échangées nourrissaient ton espérance et ton courage pour tenter de dépasser ce qui te minait intérieurement. Faut-il dire que la maladie a gagné ? Non, je ne le crois pas. Et tu nous dis ce matin que c’est toi qui a remporté une victoire pour nous tous, car tu nous montres qu’en fin de compte c’est l’amour qui l’emporte et malgré tout, la vie. Il y a dix jours je te donnais une nouvelle fois le sacrement des malades ainsi qu’à tes parents. Tu m’avais demandé de lire l’évangile de la résurrection de la fille de Jaïre où Jésus prononce cette parole : « Ne crains pas, crois seulement ! » Cette parole, elle est pour nous aujourd’hui. Maintenant que tu sais, que tu vois, tu nous dis avec le Christ : « ne craignez pas, croyez seulement ».

Homélie pour accompagner Chantal Garraud
On aurait envie de dire à Chantal, comme les disciples d’Emmaüs l’ont dit à Jésus : « Reste avec nous : le soir approche et déjà le jour baisse. Ne disparaît pas à nos yeux de chair. » Nous aussi, sans doute, nous sommes comme Cléophas sur la route d’Emmaüs, marchant lourdement et tristement. Et pourtant, nous sommes rejoints aujourd’hui, sur notre route, par le Christ et par Chantal. Elle aussi aura été pour nous un témoin de la résurrection car elle portait en elle le Christ ressuscité. Elle ne disparait pas, elle nous propose de vivre une autre présence, une communion. On aimerait qu’elle continue à nous sourire, à transmettre son dynamisme et sa foi, simple et solide, auprès des jeunes qui lui tenaient tant à cœur et auxquels elle aura investi une grande partie de sa vie avec une joie communicative. Elle aimait faire grandir. Le sens d’élever un enfant portait toute sa dimension avec Chantal. Oui, elle aimait élever vers le haut. Elle aussi leur a dit « ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth » en s’appuyant sur l’Écriture qu’elle savourait. Et c’est le cœur tout brûlant qu’elle vivait la communion au corps du Christ qu’elle recevait chaque jour jusqu’à ces derniers temps. Elle avait reconnu le Christ à la fraction du pain et voulait partager cette découverte au plus grand nombre, que leurs yeux s’ouvrent et qu’ils le reconnaissent. C’est avec tout son tempérament que nous lui connaissions qu’elle partageait ses convictions. Elle savait ce qu’elle voulait et tenait à le faire savoir. Mais elle y mettait tout son cœur, même si nous nous sentions parfois bousculés et pas toujours d’accord. Elle connaissait ses limites et regrettait parfois ces élans, et son bon cœur reprenait le dessus.
Le jour de la rentrée scolaire 2009, sa dernière rentrée au collège Jeanne d’Arc, Chantal avait lu une petite parabole aux enfants de sixième qui étaient réunis dans la cour. C’est elle qui avait choisi ce texte que nous avons retrouvé. Cela m’avait frappé, car en l’écoutant je pensais que ce texte était à son image. C’est pour ça que je veux ce matin vous le partager à mon tour en mettant dans votre oreille si vous le pouvez la voix souriante de Chantal :
« Un vendeur d'eau, chaque matin, se rend à la rivière, remplit ses deux cruches, et part vers la ville distribuer l'eau à ses clients. Une des cruches, fissurée, perd de l'eau ; l'autre, toute neuve, rapporte plus d'argent. La pauvre fissurée se sent inférieure. Elle décide un matin de se confier à son patron. "Tu sais, dit-elle, je suis consciente de mes limites. Tu perds de l'argent à cause de moi car je suis à moitié vide quand nous arrivons en ville. Pardonne mes faiblesses." Le lendemain, en route vers la rivière, notre patron interpelle sa cruche fissurée et lui dit :- Regarde sur le bord de la route. - C'est joli, c'est plein de fleurs. - C'est grâce à toi, réplique le patron. C'est toi qui, chaque matin, arroses le bas-côté de la route. J'ai acheté un paquet de graines de fleurs et je les ai semées le long de la route, et toi, sans le savoir et sans le vouloir, tu les arroses chaque jour. Ne l'oublie jamais : nous sommes tous un peu fissurés mais Dieu, si nous le lui demandons, sait faire des merveilles avec nos faiblesses. » Chantal était déjà malade quand elle a lu ce texte. Elle connaissait bien ce jour-là ses faiblesses et pourtant, elle a tenu à continuer à arroser le bas côté de sa route d’Emmaüs. Te voilà, Chantal, arrivée à l’auberge, promise à la Résurrection. Ta foi t’empêchait d'avoir peur de la vie, d'avoir peur de mourir, et augmentait ton espérance ! Tu rencontres maintenant ton Dieu qui t'a comblée de ses dons. L’épouse, la mère, l’amie, que tu as été, les lui rend en fruits. Le semeur a semé. Tu as récolté en moisson. Tu vis en plénitude. Tu entres dans l’auberge du Père. Nous qui parfois nous interrogeons sur le sens de la vie, croyons à cette double lumière : celle de notre naissance ici-bas par un Dieu qui nous aime, celle de notre naissance à la vie nouvelle. Les mystères chrétiens sont des phares merveilleux ! Aux deux bouts de nos vies. La flamme qu’elle a été a retrouvé le feu. Et c’est de cette lumière éclatante qu’elle veut nous voir irradiés aujourd’hui et demain. Sur la route d’Emmaüs qu’elle a parcourue avec nous, Chantal chante la joie de sa rencontre, attablé avec le Christ ressuscité.